• Il est de ces mots ...






    ETRE







    POETE







    OU PAS ?...







    DE CES TEMPS ...


    OU JE ME QUESTIONNE







    POURQUOI TANT DE MOTS ?...







    CAR TANT DE MAUX ?...







    NE PAS LES LIBERER ?...







    RESTER DANS LE MUTISME ?...



    RISQUER DE S'EN TROUVER ALIENEE ?...







    SI LE POETE N'ECRIVAIT PAS ...



    POURQUOI ALORS ...


    DITES MOI ...



    SERAIT-IL VENU LA ?...
     



     



    L'écoute sincère est particulière aux êtres qui ont la capacité d'entendre le silence ... Ils sont rares ...



    L'écoute sincère est particulière aux êtres qui ont la capacité d'entendre les poètes ...
    Ils sont rares ...



    L'écoute sincère est particulière aux êtres qui n'ont pas peur des mots ...
    Ils sont rares ...



    Certains chemins doivent se rencontrer et cheminer ...
    C'est ainsi que je pense ...
    D'autres ...  
    Jamais ne devraient se croiser ...



    La véritable générosité d'autrui, dans ce que l'on nomme l'amitié ...
    Dans ce que l'on nomme l'amour ...
    A mon sens ...
    C'est la capacité de pouvoir entendre le silence qui s'adresse à lui ...  
    Pouvoir l'entendre cela c'est la capacité de faire don d'une part de soi à l'autre ...  
    Sans cela pas d'amour ...  Sans cela pas d'amis ...



    La plus grande de mes peurs est de n'avoir plus rien à donner ...  
    Pire encore, que personne ne puisse plus avoir le besoin de mes dons ...
    Ce serait comme d'une brèche dans un mur ...
    Comme d'avoir brusquement à avancer vers  "autre part" ...  
    Ou vers nulle part ...  
    Là où le terrain deviendrait incertain ...
    Là où ne s'aventurent pas les humains ...



    Pourtant ...  
    Entrer dans cette brèche serait aussi pouvoir grandir en sa vie ...



    Il importe ...
    Pour le poète ...  
    De pouvoir trouver sa Muse ...  
    Alors le poète pourra vivre sans la peur de se perdre dans le néant ...  
    Car le risque d'entrer dans la brèche et d'avancer vers "autre part" ...
    Ou vers "nulle part" ...
    Entraîne le risque de ne pas le voir revenir ...
    S'il n'y a pas au dehors de la brèche la Muse qui attend le poète ...  
    Lui donnant le désir du retour ...



    Je pense que le vrai don de soi à l'autre est de pouvoir entendre, comprendre et accepter que l'autre puisse vouloir choisir le chemin qui passe dans la brèche et qui va "autre part" ...   Ou "nulle part" ...  Et pouvoir l'attendre ...
    J'appellerais cela fidélité ...



    Chaque minute qui vient de passer est une minute de vie intense ...
    Et chacune de ces minutes qui viennent de passer ne pourront plus être effacées ...  
    Elles  ne reviendront jamais ...
    Mais elles ont été vécues ...
    Quoi qu'il en soit de la suite ...



    Chaque minute pèse son poids dans ce qu'elle passe ...
    C'est pourquoi je crois que jamais rien n'est ni urgent ni pressant ...
    C'est une grande erreur que commettent les humains ...
    Croire qu'il est important d'être sans cesse au premier rang ...
    D'aller vite, de soutenir la performance ...



    Chaque minute qui passe pèse le poids du temps qu'elle a pris pour passer ...  
    C'est cela aussi le temps de vivre ...
    ET le temps de donner à vivre ...



    Les mots sont pareils aux minutes ...
    Chaque mot va quelque part, pas n'importe où et jamais nulle part ...



    Si le poète choisit de rejoindre les nuées celui qui le lira pourra se souvenir paisiblement pourquoi il a choisi d'y retourner ...



    Les mots que je vous écris sont vôtres puisque miens a vous donnés ...
    Personne jamais ne pourra vous les reprendre ...
    Vous pouvez à présent les apporter plus loin ...
    Les donner à votre manière, à votre façon ...



    Chaque mot écrit ou prononcé est un don !
    C'est cela pour moi une part de la réalisation de ce que l'on porte en soi ...
    Donner du don ...  Du don de soi ...  
    Non pas "donner de soi" mais bien donner de cette part de soi qui est le don en soi ...  
    Donner de cet impossible à retenir en soi ...  
    Ce sont  les vraies raisons pour le poète de vouloir être " là " ...
    Mais elles sont trop rares pour suffire toujours à conserver le goût de " rester là " ...  



    Ce que j'ai pu écrire ici et maintenant est comme un héritage ...  
    Si je le consigne dans des cahiers cela restera  ...
    Il se peut pourtant que le cahier brûle ...
    Mais ce que j'ai écris pourtant demeurera ...

    Si je n'avais pu les dire ces mots jamais ils n'auraient pu exister ...
    C'est comme si celui qui vient les lire au poète en aurait fait le don !  

    Le poète n'a de droit sur ses paroles que tant qu'elles ne sont pas dites ...
    Une fois que posées elles appartiennent au monde entier ...
    Et le poète sait cela ...
    Et le poète désire cela ...
    Car le poète aime cela ...
    Car le poète attend cela ...
    C'est sa liberté ...



    Le poète est de ces êtres qui ne connaissent pas la vénalité !  
    Il donne sans rien attendre en retour ...
    Les mots viennent le voir ... Il les entend ...  Cela le surprend ... Il les transcrit ...
    Il donne car il ne peut retenir en lui ...  
    Les mots s'échappent de son âme ...
    S'écoulent ...
    Comme d'une veine taillée s'écoule le sang ...
    Il ne peut les garder en cage ...  
    Les mots sont les clés de son propre devenir ...  



    L'on peut tout prendre au poète ...
    Car pour lui ne comptent que les mots encore à naître ...
    Tout le reste est matériel ...  
    Et le poète ne peut transformer en poésie le matériel ...  
    Le poète est à la fois prisonnier et otage des mots ...  
    Mais il n'est pas prisonnier de la matière ni du matériel ...  
    Ce qui le rend tout à la fois magique et incompréhensible au commun ...  



    Ainsi ces lignes ...  
    Elles resteront même après moi ...
    C'est le seul héritage que puisse laisser le poète ...
    Les mots qui lui furent donnés d'écrire ...
    Et de les pouvoir écrire le poète fait don ainsi de lui ...  
    Et honore la Muse des vocables et des vers qu'elle a pu lui laisser transcrire  ...  
    Sans cette alchimie du verbe le poète mourrait ...



    Le poète est un baladin ...
    Il se balade ...
    De mot à mot ...
    C'est son destin ...



    Le commun ne peut inspirer le poète car le commun triche ...  
    Le commun peut mystifier le poète mais ces mystifications sont de courte durée ...
    Le poète entends le vide en réponse à l'écho ...
    Il entend l'absence de résonance dans l'âme du commun ...
    Il sait et en souffre mais ne se trompe pas ...  



    C'est la Muse ...
    La Muse oui ...  
    Qui prend soin du poète ...  
    Qui veille sur lui ...



    Le commun ne peut entendre ni comprendre ni connaître ni percevoir la Muse ...
    Ni même y croire ...
    Mais non plus il ne peut la corrompre ...  
    Car il est ignorant ...



    La Muse ne s'abrite pas n'importe où ...
    Elle choisit des âmes belles ...
    Seules des âmes belles peuvent recevoir la Muse ...
    Elles seules peuvent inspirer les poètes ...
    Et la Muse le sait ...



    Car la Muse est lucide ...
    Elle éclaire le poète ...
    Il sait mais ne peut imaginer les âmes noires ...  
    Même en parlant de souffrance, de vilénie ou de laideur encore ses mots seront beaux ...  
    Seule la Muse peut l'entendre en cela ...  
    C'est pourquoi elle protège le poète ...  



    La Muse est transcendance ...  
    Et magnificence ...  
    Elle inspire le poète sans chercher à le retenir ...  
    Elle lui donne de voler...  
    De s'envoler ...  
    Elle ne veut se l'attacher ...
    Elle libère le poète dans son envol d'où il pourra lui revenir ...  



    Il n'a pas peur ...  
    Le poète ...  
    La Muse le porte à bout de bras, au creux de ses paumes, à portée de voix ...  
    Parce que là où réside la Muse il n'y a pas place pour la parole falsifiée ...  



    Le cristal est fragile ...
    Mais si riche en reflets ...
    C'est en ces reflets que se  nourrit la Muse ...
    Faisant rejaillir sur le poète la résonance des mots ...
    Et le poète chantera la profondeur de leur beauté ...
    La préciosisté de leur cristalline fragilité ...
    Même si sans cesse il vient à s'y blesser ...



    Chacun de nous apporte ce qu'en lui il porte ...  
    Cela est ainsi pour les pires humains comme pour les meilleurs ...



    Il est bien que le poète ne soit pas sans gardien ...  
    Mais il est rare de trouver le bon gardien pour l'âme du poète  ...



    Plus l'âme est éthérée et proche des nuées  ...
    Plus elle risque d'être mortellement brisée ...  



    Beaucoup de mauvais gardien convoitent les âmes belles pour les absorber ...
    S'en faire une proie, s'en faire les maîtres et les déposséder de leur essence ...



    Les poètes sont si seuls ...
    Très très seuls ...
    Si immensément seuls ...  



    L'on se rit, l'on se moque des poètes ...
    Non pas qu'ils soient à moquer ...
    Juste que le mépris aide le commun à se défendre de ce qu'il ne peut percevoir ...
    Le commun craint le poète par bassesse et sottise ...
    Le poète doit craindre le commun par souci de rémanence et de mentale chasteté ...

    Sans la Muse le poète doute de tout ...  Et de lui ...  
    Sans la Muse le poète est seul et perdu dans l'immense ...  
    Alors son âme lui demande de retourner dans les nuées ...
    Car ici bas conspuée il lui faut la mettre à l'abri ...  
    Tant elle est exposée et mise à nu ...
    Tant qu'elle se perd en ces méandres ...
    Tant qu'elle ne croit plus guère en rien ...  
    Elle perd sa confiance, elle perd ses rêves ...
    Elle se retrouve orpheline d'espoirs et de résonances ...  
    C'est alors qu'elle a peur ...  
    C'est alors qu'elle se meurt ...  



    Le poète ne peut voir son âme perdre foi en lui ... 
    Car il en mourra aussi ...



    Sans la Muse le poète est livré aux suppliques de son âme errante ...
    Qui lui demande de partir ...  
    Il est de son  devoir de les entendre ...
    Son âme insiste, quotidiennement elle tient avec lui le même discours ...
    "Où tu veux, s'il te plaît, mais ailleurs ... Ailleurs qu'ici ...  
    Oh je t'en prie ...   Mène moi là-bas ..."  
    Il ne peut ni la décevoir, ni la trahir ...
    Car elle est d'une grande lucidité ...
    D'une infinie clairvoyance ...
    Et le poète ne peut se tromper dans les discours qu'elle lui tient ...  



    Le poète est visionnaire ...
    C'est son sort ...  Sa fatalité ...

    Le poète ne dis pas : "Je veux en finir" ...
    C'est son âme, elle seule, qui insiste pour lui dire ...
    "Sous peu viendra l'heure de partir ..."
    Et il lui faut l'entendre ...
    Sans quoi elle mourra asphyxiée ...  



    Sans la Muse l'âme manque d'air ...
    Sans la Muse le poète manque à son âme ...
    Sans son âme le poète manque à sa vie ...



    Le plus grand danger mais à la fois la plus grande fascination du poète ?...  
    Entrer dans la brèche pour aller vers autre part, vers nulle part ...  
    Y mettre son âme à l'abri des huées, des calomnies ...
    Et de la lapidation des mots désacralisés ...  
    Pire que la mort est la détresse de son âme blessée ...
    Et sans son âme le peut-il seulement imaginer ...  
    D'exister ?



    Le poète ne converse pas ...  
    Il ne s'entretient qu'avec la Muse ...
    Et avec son âme ...
    Non qu'il ne veuille converser ...
    Mais ses paroles sont ineffables ...
    Sa pensée toujours indicible ...
    Alors il écrit ...



    Le poète sait que l'espoir se partage ...
    Mais il ne sait avec qui le partager ...  
    Il sait que c'est dans l'espoir partagé que se trouve sa force plurielle ...
    Celle qui multiplie à l'infini la puissance d'être soi !
    Mais il a peur d'y être trompé ...

    Mal entendre le poète équivaut à le briser ...



    Les paroles dites ici sont vôtres et quoi qu'il en soit de demain et du destin ...
    Elles resteront vôtres à l'abri dans votre mémoire ...
    C'est cela l'héritage ...



    Même si le poète choisissais de donner à son âme le répit définitif qu'elle réclame ...
    Il sera toujours présent en votre mémoire par les mots qu'il y aura déposé ...  



    Ces questionnements et pensées ne sont pas stériles réflexions ...
    C'est bien plus que cela ...
    C'est pensée essentielle ...
    Certes inénarrable ...
    C'est le drame du poète ...
    Hors de cet essentielle pensée le poète s'échappe comme d'un temps pour lui révolu ...
    Il rentrera alors dans la brèche et partira " autre part " ...
    Vers nulle part ...



    C'est pourquoi le silence doit être entendu sans jugement ...
    Pouvoir l'entendre c'est déjà donner à l'autre la liberté du choix ...
    C'est ainsi ...
    Parce que c'est aussi cela ...
    La vie ...  



    Nier l'existence d'un "autre part" c'est enlever l'espoir d'un ailleurs  ...
    Le choix de donner à son âme le répit dans nulle part est un aussi un acte de vie ...
    Ce choix il convient de le respecter tout autant que n'importe quel choix ...



    Même si tous les demains sont des autres jours ...
    Et même si ces autres jours peuvent sembler encore utiles à vivre ...
    Si l'âme du poète ne peut plus suivre il n'est pas judicieux de la forcer à persister ...
    Cela équivaudrait à l'anéantir ...  
    Et vivre avec une âme anéantie c'est pire que la mort pour le poète ...  



    La mort n'est qu'un état ...
    Rien de plus ...
    Simplement qu'il est un autre état ...
    Un état inconnu ...
    Et c'est parce qu'il est inconnu qu'il fait peur ...
    Et pour se protéger de cette peur le commun imposera au poète à rester dans le vivant ...
    Juste pour ne pas devoir contempler ce choix possible du néant !...



    Les Muse sont rares ...  
    Aussi rares que les poètes ...
    C'est pourquoi elles sauvent le poète de l'égoïsme et de la cruauté du monde ...  
    Et de l'anéantissement de son âme ...
    Pour que soient sauvés les poètes ...



    La muse permet au poète d'apprendre à partager l'espoir sans la peur de s'y perdre ...
    Sans la peur de se voir néantisé dans ce partage ... 
    Car elle est là pour lui ...
    Et la Muse ne trahit ...



    Tout se boucle  ...
    Le poète donne et partage ...
    La Muse protège en ce voyage ...



    Ces mots ont l'air très simple ...
    Mais ils sont de l'ordre du transcendant ...
    De la profondeur et du sens existentiel ...



    Pareil aux perles ...
    Rares ...



    Le souci du commun c'est qu'on lui apprend à vouloir que tout soit toujours parfait !
    Quel leurre !!!



    Le poète sait qu'il n'y a jamais urgence ...  
    Tout se passe et se fait comme il se doit que tout se passe et se fasse ...
    C'est un des avatars de ce monde ...
    Croire que tout doit toujours être immédiat et parfait ...



    Je suis née surdouée ...
    C'est un terrible destin ...
    Surtout quand cette sur dotation est le fruit de géniteurs malades et malsains ...



    Quand je dis malades je parle du mental bien entendu ...
    Ils n'avaient pas la grippe !!! 


    Peut-être est-ce là pourquoi j'héritais de la destinée du poète ?... 
    Et que les mots surgissent de moi ...
    Je ne puis les retenir ...
    Car il me faut dire pour que veuille vivre mon âme ...



    Ah Muse ...
    Je sais que tu me comprends en tout cela ...
    Et quel bonheur dis moi, quelle joie ...
    Quel soulagement que tu puisses m'accompagner ici-bas ...
    Ce passage dans la brêche, ce long chemin entrepris vers autre part, vers nulle part ...
    Il le fallait traverser pour que tu viennes m'entendre en mes silences ...
    Au moins toi ... 





    Emmanuel HANNAUX (1855-1934) - Le poète et la Sirène


    Mandragaure 


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